Le tram n’est pas vert, il annonce l’arrivée du béton
À la question pourquoi prolonger le tram E s’il y a déjà la ligne B et le bus 6 en parallèle… on répond béton. Faire une percée pour plus de constructions, c’est la finalité du tram E.
Ah les délices de la communication municipale qui tente de nous faire passer des vessies pour des lanternes. Un charme éternel. Donc on a collé l’adjectif « vert » au tram, et on prend de jolies photos ras du sol avec de l’herbe au premier plan. Tout d’abord les terrains où passe le tram étaient encore plus verts avant les travaux, le chemin de fer urbain a en réalité enlevé du vert. Et puis, on ne voit pas pourquoi ce tram serait plus vert que celui qui passe à Hautepierre. Mais l’essentiel n’est pas là.
Alors c’est vrai que les images du tram passant dans des petits champs de fleurs et de micro-jardins fraichement aménagés, c’est totalement bucolique. Mais nous l’avons démontré à plusieurs reprises sur le Blog de la Robertsau, le tram E n’est pas efficient, c’est à dire qu’il n’est pas plus rapide que le bus, son terminus est même dans un no man’s land. Il pourrait être vert s’il enlevait de la voiture, s’il proposait un trajet Robertsau-Centre plus rapide que les autres moyens de transports… Alors pourquoi dépenser 32 millions d’€ pour prolonger le tram E ?
Un investissement pour plus de béton
Comme la ligne D (celle qui va à Kehl) le tram est aujourd’hui considéré comme un défricheur de terrain. Avant de développer un secteur, la collectivité trace la route et installe une épine dorsale de transport en commun. Le tram D passe par le terrain de Starlette qui était vide, mais qui peut se développer aujourd’hui. Si on peut saluer la logique d’anticiper la présence d’éléments structurants pour les déplacements sur des « friches » ou des coins de ville en transformation, c’est une autre histoire à la Robertsau.
Pour le coup, il s’agit de faire une percée dans des terrains qui étaient inaccessibles auparavant et qui pour le coup le deviennent. Les permis commencent déjà à pleuvoir : Stradim, Promogim… et pas des petits projets.
Et puis au terminus Escale il y a le futur quartier Pourtalès. Promesse de très nombreux logements. Si le tram était réellement considéré comme un outil de transport, il aurait aujourd’hui son terminus au minimum à Sainte-Anne, voire au début du quartier des Chasseurs qui se développe aujourd’hui. Non le tram est un instrument qui permet de développer encore plus de béton. Vus sous cet angle, tous les choix deviennent logiques.
Juste une remarque.
On peut voir une lettre affichée sur le permis de construire.
Je suis allé la lire.
Elle indique que le permis a été refusé par la Ville qui a été condamnée à le délivrer par le tribunal administratif.
On peut-être en désaccord avec les choix de la municipalité sans l’accuser de tous les maux.
refusé par la ville ? donc le propriétaire a été au tribunal administratif contre la ville ? En general c’est le voisinage qui va au tribunal contre le projet accepté par la ville…Mais bon, au final ca va se construire. La police du bâtiment sait parfaitement si un projet doit être recalé, ca sent le pipeau cette histoire. A mon avis elle l’a fait exprès pour se dédouaner de la décision.
Et il paraît qu’ici, ça n’est pas un blog de combat, une sombre histoire de thermomètre ou je ne sais quoi.
Bref.
Urbanisation ou pas grâce au prolongement du tram ? Pour le savoir, regardons le dossier de l’Enquête publique de 2016 ….
– La page 318 va-t-elle nous rassurer ? On y découvre : » Dans le cas présent, le projet de prolongement « Nord » de la ligne E de tram n’a pas vocation première à induire de l’urbanisation nouvelle dans ce secteur ». Cela fait un peu langue de bois…. Comment comprendre « vocation première » ?
– Alors, allons page 226 (étude d’impact) : » Extension du tram, élément majorant dans l’évolution future de la démographie du quartier, en particulier dans le corridor du tramway. « . Au moins, là, les choses sont claires ! Et en plus, c’est cohérent avec les objectifs du PLUi : « Viser pour la production globale de logements à Strasbourg, 100 logements/ha en moyenne [….] Et plus dans les secteurs proches (300m) des transports en commun structurants » (Dossier EP PLUi : POA habitat page 22)
Quand on sait qu’il y a 2,12 occupants (en moyenne) par logement à la Robertsau*, combien d’habitants/ha pourrait-il y avoir dans les nouvelles urbanisations possibles le long de notre tram ? C’est beaucoup ? Pour s’en rendre compte, combien à Paris intra-muros ? Réponse : 212 habitants/ha * … aussi !
« Construire la ville sur la ville » ….
* en moyenne, en 2013 : données officielles.
Bravo Christine pour vos recherches approfondies, qui montrent bien les intentions sinon arrêtées en tout cas évidentes à moyen terme.
Il n’est pas envisageable de financer une voie de tram, qui représente rappelons-le le summum de l’investissement en transport urbain (ex : la ligne H gare-parlement européen est lancée dans un 1er temps sous forme de bus électrique sans aménagements routiers lourds, alors même qu’elle est bien plus stratégique que l’extension vers l’Escale !) sans contrepartie…
En même temps, puisque la Robertsau est amenée à se développer encore davantage, n’est-il pas préférable que ce soit autour d’un transport en commun propre et structurant qu’autour de l’automobile ?
Si seulement ce tram était plein !