Ceinture verte : le repas de l’ogre béton
La loi sur la ceinture verte promettait d’offrir un poumon vert aux Strasbourgeois. La zone verte est aujourd’hui offerte en festin à l’ogre béton, par ceux qui sont censés la protéger. Une association tente, avec difficulté, de la protéger : ZONA.
Il n’est pas toujours facile de s’y retrouver dans les affaires d’urbanisme. La complexité des ces dossiers est bien réelle, et comme nous l’avons souvent écrit ici sur le Blog de la Robertsau, l’administration ne fait aucun effort pour rendre la chose facile d’accès.
Une loi nationale pour protéger la nature
La Ceinture Verte de Strasbourg est issue des anciens systèmes de défense pour disposer d’un espace libre de toutes constructions devant les fortifications (« Non Aedificaedi », c’est à dire, non constructible).
Les emprises et les dispositions qui s’y appliquent sont mentionnées dans deux lois datant de 1922 et 1927, abrogées partiellement par la Loi n°90-1079 du 5 décembre 1990 relative aux zones non aedificandi de la ville de Strasbourg imposant des conditions de limitation de construction à 20% de surface bâtis au sol.
Nous avons rencontré Denis Matter de l’Association ZONA – Ceinture Verte. Depuis 1986, elle tente, difficilement, de faire respecter cette limitation de 20 %.
La Ceinture Verte : qu’est ce que c’est ?
En moins de 3 minutes, vous allez tout savoir et comprendre la Ceinture Verte.
Pourquoi contester les projets de la ville ?
La ceinture verte aiguise les appétits de tous les opérateurs de grande opération urbaine. Il y a des terrains et de la place pour y réaliser des projets d’envergures.
Seulement, rien n’y fait, il y a une loi qui supplante les réglementations comme les PLUi (Plan Local d’Urbanisme Intercommunale). Pour défendre la ceinture verte, l’association Zona est devenue experte en recours et a déjà obtenu de beaux succès.
En 1986, le Tribunal Administratif de Strasbourg puis en 1989 le Conseil d’État ont donné raison à l’association ZONA ainsi qu’à 350 familles contre le Préfet du Bas Rhin et la Ville de Strasbourg en invalidant la tentative d’expropriation de terrains et immeubles privés (environ 20 ha) situés dans cette Ceinture Verte. « Abus de droit » écrivait le Conseil d’État car l’expropriation avait été détournée de son objectif pour constituer des réserves foncières.
Un combat difficile, car l’association a face à elle l’administration (Ville, Communauté Urbaine, Préfecture, institutions…) et que les recours ne sont pas suspensifs. Des procédures longues, complexes et surtout usantes. D’où le coup de blues de la tribune de Denis Matter.
Aujourd’hui, la loi permet à la collectivité de construire sur 20 % des zones constructibles de la zone verte, mais dans ce calcul la ville inclut également les ponts, les autoroutes, les rivières, les cimetières… d’où des droits de constructions gigantesques.
Denis Matter nous explique l’objet du litige :
Un exemple : la chaudière du Wacken, un permis de 37 m² !
Au cœur de la zone verte, la ville /EMS viennent de construire une chaudière « dite biomasse ». (Nous aurons l’occasion d’y revenir sur le Blog de la Robertsau). L’immense bâtiment avait pourtant un permis de construire de 37 m² !
Le président de l’association Zona nous explique comment la collectivité détourne l’objet de la loi pour finalement dévorer le poumon vert de Strasbourg :
Des signaux alarmants
Alors que la qualité de l’air de Strasbourg est un problème grave et inquiétant, que les épisodes de canicules sont de plus en plus nombreux, que la températures des villes pourrait augmenter de plus de 8 ° (voir article du journal Le Monde du 31 mai 2017 : La température des villes les plus peuplées pourrait croître de 8 °C d’ici à 2100), que l’on sait que la température en milieu urbain peut varier de plus de 10 ° en fonction de l’endroit, le respect de la zone verte est une des solutions pour les générations futures strasbourgeoises et robertsauviennes.
L’association Zona cherche des soutiens, particulièrement financiers, pour continuer ses actions en justices. Si vous souhaitez soutenir son combat n’hésitez pas !
Stop au béton
Dans une étude intitulée Les îLots de fraîcheur dans La ville , l’ADEUS (agence de développement de l’urbanisme strasbourgeois) pointait les différences de températures de Strasbourg.
Strasbourg est une des villes en France où le béton continue le plus fortement son travail de sape,et à un rythme effréné ,sans parler d’installations ultra polluantes en plein centre, effectivement , alors que beaucoup d’autres grandes villes ont bien pris la mesure des dangers de la pollution de l’air et de la qualité de vie dégradée , et commencent à replanter des arbres, faire pousser des quartiers réellement végétalisés , protéger les sites verts existants, entre autres,délocaliser des usines polluantes ou exiger qu’elles prennent des mesures pour réduire leurs émissions de particules ,interdire l’accès du centre ville aux véhicules les plus polluants, etc, etc…Quand on revient de vacances passées ailleurs, on a beaucoup mal à se reconnecter à l’atmosphère irrespirable de Strasbourg , et en tant que strasbourgeois de souche, on ne peut que se désoler, année après année , de la politique urbaine qui se désintéresse totalement de la nature en ville (oh pardon : hormis le fait de laisser les mauvaises herbes pousser sur les trottoirs :-)) pourtant absolument indispensable, surtout vu l’évolution du climat.
M Fischer a raison. A Tokyo, New-York, Paris, Marseille, Toulouse, Rennes…, on lance des programmes pour végétaliser l’espace urbain.
Mais à Strasbourg, l’objectif premier, c’est : « construire la ville sur la ville », densifier*. Donc : « béton, béton, béton ». Voir l’avenue du Rhin. Après, on habille les façades pour avoir un look plus fun. Les arbres, où sont-ils ? A la Robertsau, on a rasé le petit bois pour l’Ecole Européenne. Entre la rue Mélanie et l’Escale, les arbres abattus pour le tram ne seront pas tous remplacés…
Tant pis pour les habitants de ces îlots surchauffés en cas de canicule (excellente carte de l’article) ! Le pire ? Vous pensez qu’avec tous ces chantiers qui « poussent » à Strasbourg notre ville est prospère ; ne disait-on pas autrefois : « quand le bâtiment va, tout va » ? Hélas ! Le taux de chômage y est de 10 % (plus que la moyenne nationale) et sa zone d’emploi est classée 177ème sur 321 !!!
Lanceur d’alerte, l’association « Zona » est courageuse. Mais les promoteurs sont si puissants….
* Objectif du PLU pour les nouvelles urbanisations à Strasbourg ? En moyenne, 100 logements /ha, soit 20 400 habitants/Km2. A peine moins qu’à Paris (21 154 h/Km2) !!!