Fritz nous a quittés

Fritz nous a quittés

Frédéric Dröge, que tout le monde appelait Fritz, nous a quittés. Une figure de la Robertsau s’est éteinte.

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Frédéric Dröge, que tout le monde appelait Fritz, nous a quittés. Une figure de la Robertsau s’est éteinte.

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C’était une figure emblématique de notre quartier. Fritz nous a quittés mardi 4 octobre. Tout le monde l’a au moins rencontré fois, et quand vous le croisiez, cela ne vous laissait jamais indifférent, tant son énergie et sa bonne humeur étaient communicantes.

Amoureux passionné de la Robertsau il avait œuvré pour la remise en eaux du Canal des Français, la rénovation de la maison des douaniers…

Retrouvez sa voix et sa bonne humeur dans cette petite vidéo prise lors d’une soirée Bluegrass au Tivoli.

Le hasard a voulu que nous ayons publié il y a quelques jours, sur notre page Facebook, une photo de la maison qu’il habitait…

La cérémonie religieuse aura lieu le lundi 10 octobre 2016, à 14 h 30, en l’église protestante de Strasbourg-Robertsau, rue Boecklin.

À son épouse, ses enfants, sa famille, à ses proches et tous ses nombreux amis, l’équipe du Blog de la Robertsau présente ses plus sincères condoléances. Il manquera à la Robertsau.

Un figure attachante de la Robertsau

Voici ce qu’en disait Robert Grossmann dans son ouvrage « Ma Robertsau » :

« Est-il possible d’évoquer la Robertsau sans réserver une place de choix à cette figure si singulière, si combattive, si poétique, qu’est Frédéric Dröge, « de Fritz » ? Il est à lui seul une institution, une mémoire du quartier. Sa gouaille autant que ses interpellations sonores sont uniques. Il est partout et tient son quartier général là où se déroule la vie populaire, tantôt au restaurant-PMU du Tivoli, tantôt à la boulangerie pâtisserie de la Cité de l’Ill qui avait fermé ses portes à son grand désespoir. Il milite pour que les traditions restent vives, a « son » opinion évolutive sur la politique et s’était illustré en éditant et diffusant son propre petit Laüch Blättel – « Les amis de la Robertsau » – journal dans lequel il défendait le quartier à sa manière. »

Voici le portrait de Fritz réalisé par Marie-Laure Beaujean dans la feuille du Laüch de janvier 2015

Qui ne connait pas Frédéric Dröge à la Robertsau ?

« Qui ne connait pas Frédéric Dröge à la Robertsau? Celui que l’on appelle volontiers l’ami “Fritz” nous a gentiment accueillis chez lui pour un brin de causette, en compagnie de Bernadette, celle qui partage sa vie depuis 40 ans… D’emblée, Fritz évoque ses passions : sa famille, la Robertsau et le Canal des Français. Ce canal prend une dimension toute particulière quand on sait qu’il lui a sauvé la vie.

Canal des Français

Mais revenons aux origines : Fritz, qui prépare une grande fête pour ses 80 ans cet été, est né le 13 aout 1935 à la Robertsau, rue de l’Afrique, au bord du canal (avant le comblement de cette portion) dans une petite maison qui existe encore, d’un père batelier et d’une mère au foyer. Il se raconte : une “enfance dure mais joyeuse”. Le Canal encore : à l’âge de deux ans, le médecin de famille conseillait à sa maman : “si ton fils ne veut pas apprendre à marcher, jette le dans le canal des français, ça va aider”. Tout le quartier a assisté à la scène et a vu le petit Fritz jeté à l’eau ! “Et à peine sorti, j’y suis retourné !” s’amuse Fritz en racontant l’anecdote, tout sourire en évoquant ce souvenir. Le canal comme terrain de jeu : “Les enfants s’y retrouvaient tous les jours. Le soir, les mères venaient s’y laver et nous cherchaient pour rentrer à la maison.”.

Quelques années plus tard, Fritz doit fêter ses 9 ans dans 2 jours… Nous somme le 11 août 1944. “Nous habitions une maison en face, 10 rue de la Carpe Haute. Il faisait très chaud, les enfants s’amusaient dans le Canal des Français, nous avions eu l’autorisation de les rejoindre. Et soudain une quarantaine, cinquantaine d’avions… une vague nous a emmenés… nous avons couru dans le bunker, les Dröge sont en vie grâce au canal. Les Andrès sont morts dans la cave de leur maison.”. Un hasard salvateur sur l’instant donc, car quelques minutes après son départ pour rejoindre ses petits voisins, sa maison et quelques autres bâtisses robertsauviennes seront réduites à néant par un bombardement allié sur le port aux pétroles. Des victimes civiles seront hélas à déplorer.

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La maison des douaniers

Fritz fut relogé par la suite avec sa famille dans la “maison des douaniers”, et sa fameuse tour de guet. Comme un héritage, un devoir de mémoire, il ne l’a plus quittée. Des souvenirs encore autour du canal entre l’utile et l’agréable. “La longue descente pour les chevaux des jardiniers, des agriculteurs, amenés là pour être rafraichis, lavés, en été. On avait le droit de les brosser.” Avec ses deux mètres de profondeur au maximum par endroits, le cours d’eau invitait aux jeux nautiques ; des chaînes départageaient les zones de baignade. “Nous n’avions pas de machine à laver le linge à l’époque et été comme hiver, tous les lundis ma mère Mathilde lavait les draps… J’ai été mis dans l’eau froide car je salissais beaucoup ! ”Une punition méritée mais pas si désagréable ! » Et puis “ils” ont fermé le canal. Ce que regrette amèrement Fritz. La restauration récente d’une partie de l’ouvrage lui met un peu de baume au cœur.

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Une vie entre terre et eau

Autre souvenir entre terre et eau. Comme son père qui a navigué pour une firme hollandaise toute sa vie, Fritz a travaillé en tant que batelier. Alors qu’il avait 14 ans et demi, sur un bateau transportant 1000 tonnes de farine destinée à l’Égypte, lors d’une escale dans le grand port de Rotterdam, Fritz se souvient de sa rencontre avec la reine Juliana de Hollande et de sa fille Béatrix. Le personnel des bateaux étrangers présents au port avaient été invités par la Reine à l’occasion des fêtes de Noël. “J’avais hissé le drapeau français sur le bateau. Je parlais allemand, la reine parlais très bien le français…”.

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Fritz devant le Canal des Français – Photo Perrine Dröge

Mais ancré à la Robertsau

Bien ancré dans son quartier, sa terre natale, Fritz en défend aussi le patrimoine qui fait partie de l’identité du “village”. À l’époque, tout juste retraité, son premier cheval de bataille fut de demander à Catherine Trautmann de mettre en œuvre l’aménagement de la Petite Orangerie. Fritz s’est aussi battu pour la maison dite “des contrebandiers” ou “des douaniers”. Inscrite dans le cœur de Frédéric, la maison qu’il habite a un caractère remarquable et pourtant elle a bien failli disparaître du paysage : jugée vétuste, avec des coûts trop lourds à supporter pour la rénover, elle était vouée à la destruction. C’était sans compter sur la ténacité et la détermination de Fritz, qui saura convaincre et permettra la rénovation de “sa” maison en 2003 par son gestionnaire, Habitation Moderne. De la date de construction vers 1725 à la fabrique de cigarette qu’elle abritait en 1913, des murs en pierres de grès de Gresswiller à l’aménagement en 1884 de la tour qui la surmonte, Fritz est intarissable “Et ici où vous voyez la cuisine se trouvait l’ancienne écurie…”. La fameuse tour de la maison a servi d’atelier à plusieurs artistes.

Une ambiance artistique contagieuse : “Je suis fan de tableaux que j’achète aux marchés aux puces”. Les alentours étaient propices aux balades avec son chien Sam, un teckel. Il y a une vingtaine d’années, en début d’après-midi, Fritz, accompagné de son fils se retrouve nez à nez avec 4 sangliers, à 50 cm de distance. Les sangliers passeront leur chemin, sans se soucier de la grosse frayeur des promeneurs ! Le teckel qui avait détalé, rentrera au bercail vers 21h, exténué. Souvenirs… “Beaucoup de renards dans le coin : mes canards en ont fait les frais ! ”.

Alerte et curieux de tout

Fritz reste alerte et curieux de tout. Si autrefois, il fut président des 150 jeunes de l’AS Cité de l’Ill et également un ancien membre de la Concorde, aujourd’hui il ne fait plus de sport mais n’est pas sans activité pour autant. Il aime retrouver ses amis au Tivoli par exemple. Quand il arrive, on entend… “Voilà le Maire”.

Rencontrer les Robertsauviens et discuter de l’actualité du “village” ou encore aller “sur les péniches quai des bateliers parmi les étudiants et les jeunes qui rient, discutent d’autres choses que de pacemakers ou d’impôts…” : ça serait ça le secret de son entrain, de sa jeunesse à l’aube de ses 80 ans ? Avec une occupation et une préoccupation que sont le Canal des Français et le bien-vivre à la Robertsau, Fritz a de quoi faire ! Merci Fritz pour cette belle rencontre et les nombreuses à venir aux quatre coins du “village” !

(article de Marie-Laure BEAUJEAN et Jacques GROSS publié dans la feuille du laüch )

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