[Tribune] Ne pas commettre l’irréparable au cœur de la Robertsau – par Robert Grossmann
Alors que le conseil municipal doit donner son avis sur la vente du foyer St Louis le 21 mars prochain, Robert Grossmann vient de publier sur son site une tribune qui résume les enjeux pour la Robertsau.
« Le quartier de la Robertsau mérite d’être traité – doit être traité – comme tous les autres quartiers de Strasbourg. C’est une question d’équité et, disons-le, de justice urbaine et sociale.
Les élus en charge de notre ville ont toujours accordé une grande et légitime importance à ses places, à ses espaces de convivialité et de rencontre.
De manière non exhaustive et à titre d’exemple, on peut citer les heureux traitements qui ont été réservés à la place Saint Thomas, place Saint Maurice, Place du Château, Place de l’hôpital, Place du vieil hôpital, Place du marché à Neudorf…
Ces places rénovées ont contribué à embellir notre ville et, surtout, à créer une agréable convivialité pour tous.
Au cours des dernières années, la Robertsau n’a pas bénéficié de tels traitements, disons que l’occasion ne s’est pas présentée.
Une grosse affaire immobilière et financière
Il se trouve que son centre, le cœur du quartier, n’est pas très lisible. Il est symbolisé par la place du Corps de Garde où se tient son marché et qui jouxte de manière immédiate un haut lieu de rencontres connu de nombreux strasbourgeois qui s’y sont réunis pour des occasions festives, familiales, religieuses, culturelles, politiques, c’est le Foyer Saint-Louis. Depuis près d’un siècle ce foyer et ses multiples salles jouent un rôle majeur dans la vie sociale du quartier. Or ce foyer (s’Vereinshuss) ainsi que le terrain libre attenant est propriété de la paroisse catholique alors que dans l’imaginaire collectif il est considéré comme un bien public.
À la stupéfaction générale, le conseil de fabrique de l’église, dans la plus grande discrétion, a décidé de le détruire et de vendre son terrain à un promoteur qui construirait une cinquantaine d’appartements. Il s’agit d’une grosse affaire immobilière et financière.
Le prétexte en est que la paroisse ne veut plus de son foyer et a décidé d’en construire un nouveau, en tous points semblable à celui construit par la paroisse protestante.
Les effets funestes seraient triples
Son projet devrait se situer sur le jardin à côté de l’église, si caractéristique de l’identité robertsauvienne.
En conséquence, si la ville décidait de suivre la paroisse, les effets funestes seraient triples – d’une pierre trois mauvais coups –
- Destruction d’un bâtiment parfaitement sain et qui ne demande qu’à remplir ses fonctions sociales.
- Densification urbaine avec son cortège d’effets néfastes sur la circulation et le stationnement. Congestion par bétonification !
- Destruction d’un jardin emblématique.
Tout cela s’est concocté au sein du conseil de fabrique de la paroisse en présence d’un représentant de la ville qui y siège et qui, à aucun moment, n’a fait valoir l’impact sur le cœur du quartier. La population n’en a pas été informée. Aucune concertation n’a eu lieu !
Il aura fallu la vigilance de certaines associations et de citoyens attentifs pour soulever le lièvre. Un collectif « Un cœur pour la Robertsau » s’est constitué et grâce à son engagement et à ses alertes, le maire a décidé de différer la délibération du conseil municipal indispensable au projet.
Des réunions ont eu lieu dont on peut dire qu’elles n’ont eu pour seul but que de temporiser pour, in fine, laisser faire la paroisse et le promoteur. Certes le premier adjoint qu’il convient de remercier pour son engagement, a affirmé que « ce projet ne pourrait pas être le même à l’issue de ces rencontres que celui présenté initialement par la paroisse »
Toutefois le maire a, quant à lui, affirmé que la ville ne s’engagerait en aucun cas financièrement dans cette affaire… contrairement à ce qu’elle a fait dans les autres quartiers de Strasbourg.
Je ne veux pas croire que dans son esprit la Robertsau serait un quartier laissé pour compte et je fais à nouveau appel à son sens de l’intérêt général et de l’équité entre quartiers. Il peut trouver dans ce dossier une belle occasion de valoriser son action municipale.
En effet cette malheureuse affaire a une vertu : poser clairement la question du centre du quartier. Elle serait l’occasion de redessiner le cœur du Läusch et de créer un espace de convivialité agréable et digne du quartier européen. J’avais suggéré un « atelier urbain » dont l’objectif aurait été de laisser libre cours à l’imagination et à la création urbanistique et architecturale. Il n’y eut jusqu’à présent qu’un groupe de discussion.
Pour nous il importe que le cœur de notre quartier ne soit pas irrémédiablement et définitivement gâché mais, au contraire, valorisé.
Terminons par cette belle phrase attribuée à Saint-Exupéry, que l’on peut transposer à notre foyer Saint-Louis :
« Nous n’héritons pas de la terre de nos parents, nous l’empruntons à nos enfants. »
N’est ce pas ? Nous n’héritons pas le Foyer Saint-Louis de nos prédécesseurs, nous l’empruntons à nos successeurs.
Robert Grossmann
bel et bon mais …
Je m interroge sur les solutions que préconise le collectif. Si comme lui je pense qu’il est important de promouvoir un lieu susceptible d accueillir, a la Robertsau, des spectacles vivants de qualité et des locaux a usages multiples ,et si effectivement le Foyer st Louis rénové et mis aux normes est le lieu ad hoc , il reste qu’en ces temps de disette budgétaire le coût de cette opération mérite un chiffrage un peu moins approximatif que celui qui nous a été présenté, Et ,contrairement a ce qui a été dit ,nous avons un élément de comparaison : le lieu d’Europe dont la préservation /rénovation /normalisation a couté( a l origine 2.6 millions €) a l arrivée 3.3 millions .Un budget au moins équivalent est nécessaire pour le Foyer st Louis, voire même supérieur si ,comme l’a fort justement rappelé B Irmann on souhaite recevoir des artistes grand public , La jauge pertinente pour une telle salle de spectacle est au minimum de 350 places assises. Une salle moderne de cette taille, a elle seule représente un budget de 2.5 à 5 millions selon la qualités des équipements . Plus un ou plusieurs fonctionnaires permanents et leurs salaires . Tout cela prélevé dans la poche du contribuable….est on prêt à financer un tel projet ? La solution préconisé par le collectif à savoir la vente à un promoteur de l’actuelle mairie de Quartier ,/halte garderie n’est qu une argutie. On connait la détermination des riverains de la rue du Parc et autres qui s’opposeront , peut être avec le même succès, à une telle opération .Un autre point me pose un réel problème , il semble bien d après le livre blanc que la paroisse serait l’utilisateur prioritaire de cet équipement financé par les contribuables , même si les lois concordataires obligent les collectivités au respect et au financement des cultes (enfin de 3 cultes ) il me semble pour le moins alarmant de faire « chèrement » payer un équipement à utilisation réservataire du culte catholique .On pourrait imaginer que la paroisse après une rénovation réserve une partie des locaux ,en permanence, pour y loger des associations (Opus Dei , manif pour tous , ou civitas etc ….) qui de ce fait ,en plus de la base scout ,occuperait la totalité du lieu .Par ailleurs Il m’apparait que choisir de ne pas profiter de la possibilité de construire un ensemble immobilier sur les terrains attenants est une aberration , c’est la solution qui permettrait de financer une très grande partie voire la totalité de la mise en conformité avec les nécessités d’une salle de spectacles et de locaux annexes (studios de répétitions, de sport , de réunions etc ). La construction de 40/50 logements au centre ville, largement desservi par les transports en communs n’apporterait conformément à la réglementation en vigueur que 20/25 véhicules maximum sur le site , si on ne peut absorber de nouveau flux …c est grave ! sans compter que cette nouvelle implantation pourrait comporter des commerces, voire un marché couvert permanent qui libérerait la place du corps de garde qui deviendrait possiblement un cœur de ville convivial .Je reste très attentif au développement de ce projet surtout si cela peut empêcher francis Lalanne de revenir a la Robertsau ? .Le beurre , l’argent du beurre et le fond des poches des contribuables c’est en gros ce que réclame le collectif… cordialement
Cher Franck, le collectif ne veut ni le beurre, ni l’argent du beurre, au contraire, il veut moins de beurre, mais mieux de beurre !
La « disette budgétaire », vous le savez bien, est toute relative, il n’est qu’à voir certains choix municipaux, ailleurs à Strasbourg. Elle est affaire de volonté et de priorités électoralistes, nous le savons bien. C’est une forme de paresse politique et intellectuelle, dictée par les ultralibéraux, que de ne voir que les aspects financiers d’un projet pour l’évaluer. Comme a pu le dire une ministre récente : « la pensée pauvre ne raisonne qu’en termes de moyens financiers. »
Mieux de beurre : nous pensons que la rénovation / mise aux normes du foyer Saint-Louis actuel serait la solution la moins coûteuse et la plus bénéfique pour tous. Tout a déjà été dit là dessus et je me permets de vous renvoyer à notre site uncoeurpourlarobertsau.com pour vous rafraichir la mémoire.
La pseudo-concertation à laquelle nous avons été conviés n’a jamais permis de discuter de cela et de toutes les autres alternatives, la paroisse s’y refusant strictement et parfois violemment, avec la complicité bien accommodante de nos élus.
Quelques remarques, quand même, sur votre commentaire.
La solution Logements + mairie de quartier n’est pas de notre fait (voir notre livre blanc), mais est portée par nos élus, Alain Fontanel en tête. Elle nous a été présentée en juin dernier. Nous sommes opposés aux logements à cet endroit, car il nous est essentiel de préserver les cours du foyer pour en faire des espaces publics. L’idée de transférer la mairie de quartier dans le foyer nous intéresse, car elle renforce la polarité du secteur. Au-delà de ce qu’elle entraine pour le foyer, cette proposition nous démontre surtout qu’une implication financière de la Ville dans ce dossier n’est pas si impossible que ça ! Où on voit que la fameuse « disette budgétaire » est à géométrie variable.
D’autre part, sans doute pour effrayer le contribuable, vous comparez le foyer Saint-Louis avec le Lieu d’Europe ou une salle de spectacle fort coûteuse. Mais que n’aurions-nous aimé parler chiffres avec la paroisse et les élus ! Bienheureux êtes-vous, qui semblez introduit dans le secret des masses financières et des hypothèses chiffrées ! Nous, pauvres citoyens de base quoiqu’investis depuis des lustres dans la chose publique, n’avons pas eu ce privilège de pouvoir évaluer les masses alternatives à la grosse opération financière que la paroisse nous concocte…
Oui, parlons chiffres, mais sur des projets alternatifs : personne, parmi nos interlocuteurs, ne s’y est osé et pour cause. Reste la réalité de ce qui se trame : 2,9 millions de recettes pour la paroisse (vente du foyer et de ses terrains annexes) pour environ 2 millions de coût (construction du nouveau foyer et de ses annexes), bénéfice ? Je vous laisse faire le calcul.
Dans le cas d’un transfert de la mairie de quartier vers le foyer, les fonctionnaires seraient les mêmes, Franck. On ne milite pas pour l’explosion de la masse salariale de la mairie de quartier, même si, parfois, on se dit qu’elle en aurait bien besoin. L’avantage de cette solution serait que les agents de la mairie de quartier relocalisés au foyer pourraient aisément décharger la paroisse de ses charges de gestion du foyer. Oui, municipalisation de la gestion du foyer, et pourquoi pas ? Avec accès prioritaire à ses salles et équipements pour la paroisse et ses œuvres. Pourquoi pas ?
Sur la réaction des gens de la rue du Parc, qui pourraient se mobiliser contre la vente de l’actuelle mairie, ben oui et alors ? En République, mais peut-être pour plus longtemps, il se trouve que les citoyens ont le droit et peuvent se mobiliser contre quelque chose qui leur déplait. Nous avons la chance d’avoir des tribunaux et des juges pour cela. C’est la règle de notre démocratie. Pourquoi en avoir peur ?
Nous, au collectif, ce qui nous étonne le plus, c’est que ceux qui se sont mobilisés contre le projet rue du Parc, à quelques coudées du foyer, ne s’inquiètent pas plus que ça du projet immobilier sur le foyer, d’ampleur beaucoup plus importante. Où sont-ils ? Apparemment, la mobilisation NIMBY, c’est comme votre « disette budgétaire » : ça dépend.
Enfin, les voitures. Il faudra revoir vos chiffres, parce qu’à la Robertsau, ils explosent, quant il s’agit de voitures. Votre calcul de 20 à 25 voitures « maximum » (sic) sur le site, c’est celui que les règles de construction vont imposer au promoteur pour la création de places privées (0,5 place par logement). Mais vous savez bien que le taux moyen de motorisation des ménages de notre quartier dépasse largement les 2 véhicules. Donc, le vrai calcul, c’est 40 logements x 2 = 80 voitures « minimum » en plus, ce qui, rue des jardiniers, est loin d’être négligeable, si ?
Je passe sur vos allusions aux relents un peu rances du comportement autiste de notre paroisse catholique, qui ne laissent d’inquiéter beaucoup de gens, sauf nos élus,…