Projet Wacken – Europe : où en est-on ?
Vous n’y comprenez rien au projet Wacken Europe ? Rassurez-vous, nous non plus. Pour y voir plus clair, le Blog de la Robertsau publie une tribune d’Arnault Pfersdorff, président de l’Association Défense Intérêts des Riverains de la rue du Tivoli qui fait le point sur l’ensemble du dossier.
« Les clés de l’Urbanisme sont les quatre fonctions : habiter, travailler, se recréer, circuler » Charte d’Athènes, 1933
Le projet Wacken Europe de l’actuelle municipalité concerne au premier chef les robertsauviens puisqu’il va modifier les conditions d’accessibilité du canton et son environnement.
La municipalité souhaite équiper la Ville de Strasbourg d’un nouveau Parc d’expositions ( PEX) estimant que l’ancien est obsolète par sa configuration en halls disséminés sur un terrain qu’elle veut dédier au développement d’un parc immobilier dit européen (QAE quartier d’affaires international).
Ce projet est associé aux travaux d’extension et de modernisation du palais de la musique et des congrès ( PMC ) qui viennent de démarrer en juillet.
Cet ensemble de 3 projets forme un triptyque appelé projet Wacken Europe.
Le Quartier d’Affaire Européen
Ce programme de 200.000m2 est prévu en deux phases :
80.000m2 pour 2013-2018 (120.000m2 pour 2017-2025 si la première tranche est un succès). Il englobe les terrains qui vont de la place Adrien Zeller (Conseil régional) aux pieds du Parlement européen.
Le Parlement européen serait demandeur de locaux supplémentaires (30.000m), de bureaux et de salles de conférence qu’il louerait à la Ville pour les acheter dans un deuxième temps. Il y aurait également une demande pour un programme tertiaire (35.000m2: bureaux, sièges, centre d’affaires), des hôtels et résidences hôtelières (10.000m2), commerces (5000m2) et logements (10.000m2).
L’ensemble de ce projet devra veiller, en dehors des considérations purement économiques, à respecter les règles de l’urbanisme, en particulier la mixité (logements, espaces verts, circulation piétonne, lieux de rencontre, commerces, crèches) afin de ne pas voir naître une large zone tertiaire sans âmes, en particulier le soir et les week-ends. Strasbourg supporte déjà un degré de tertiarisation de 83,2% (source INSEE) contre 80% pour Lyon.
L’épisode de l’été 2012 où la municipalité a abandonné avec fracas l’option retenue sans débats de confier ce projet à l’équipe Bouygues a montré à quel point il s’agissait d’un sujet sensible qui ne pouvait être abordé à la légère.
Il y a donc lieu de s’interroger sur le mode de financement d’un tel montage dans une période de crise où de nombreux locaux tertiaires n’ont toujours pas trouvé preneurs.
Les très récents chiffres publiés par BNP Paribas Real Estate indiquent pour Strasbourg « une baisse de 40 % en 2012 dans le niveau des transactions de bureaux par rapport à 2011 ».
Par ailleurs, il manque une étude fiable quantifiant les besoins hôteliers.
L’actuelle offensive du lobbying anti Strasbourg rend urgente une affirmation plus forte de la part de notre gouvernement de soutenir Strasbourg. La simple taskforce locale n’est pas suffisante.
Les Strasbourgeois doivent aussi s’approprier ce sujet qu’ils semblent délaisser estimant, peut-être à juste titre, qu’il ne bénéficie qu’aux hôteliers, aux chauffeurs de taxi et aux restaurateurs. Les politiques locaux devraient donc réagir à l’unisson ce qui à l’approche des municipales n’est pas gagné.
Une option européenne forte et non négociable avec demande de localiser le Secrétariat des Institutions européennes à Strasbourg et non plus au Luxembourg doit être envisagée. Celle-ci n’est possible qu’en améliorant la desserte de la ville (voie aérienne en particulier, meilleure interconnexion des réseaux de transports en commun).
Les candidats aux municipales devraient envisager de créer un poste d’adjoint en charge des affaires européennes.
Le Palais de la Musique et des Congrès
Le coût des travaux qui viennent de démarrer est estimé à 90 millions d’euros TTC et porte sur 8000m2 de SHON supplémentaires (surface hors oeuvres nette). Le PMC actuel, inauguré en 1975, agrandi une première fois en 1989, doit être modernisé.
Ces travaux qui font consensus prévoient un nouvel amphithéâtre de 600 places, un hall d’exposition, des salles de réunions. Ils se dérouleront sur trois à quatre années. Sans remettre en question la nécessité de ces travaux, des questions se posent néanmoins quant à :
– la capacité des stationnements va être réduite 400 places. Elle va passer de 540 à 150 places. Les visiteurs devront pour la plupart stationner dans le parking des rives de l’Aar se situant à 500 mètres de l’entrée principale du PMC avec cheminement piéton mal fléché et peu pratique;
– la complexité du trafic automobile déjà trop dense. Cette extension à elle seule générera une augmentation de 26% de celui-ci (étude d’impact du cabinet Oréade-Brèche commandité par la CUS) dans un secteur déjà saturé (actuellement 22.000 véhicules jours avenue Herrenschmidt, 50.000 véhicules par jour sur l’A350).
Le cabinet d’études cité plus haut signale que la saturation du réseau routier est principalement observable au niveau du point de convergence de l’avenue Herrenschmidt, de l’avenue Schutzenberger, de l’avenue de la Paix et de la rue Ohmacht. En clair, cette zone concerne une bonne partie du nord de l’agglomération strasbourgeoise.
La même étude rappelle les mesures des émissions annuelles en Benzène, NOx, PM10, et CO qui dépassent largement les limites hautes, en particulier avenue Herrenschmidt, et le long de l’autoroute A350 (chiffres de l’ASPA).
L’accessibilité par Tram n’est pas incitative: la station la plus proche est située au niveau du Lycée Kléber, soit 400 mètres avec parcours semé d’embûches (pelouses, rues et avenue à traverser).
Le Parc des Expositions
Le futur Parc des Expositions de Strasbourg / Vidéo CUS
Le coût des travaux est estimé à 220 millions d’euros TTC. Leur financement se ferait en régie interne, c’est-à-dire supporté par les Strasbourgeois.
C’est ce troisième élément qui fait couler le plus d’encre. 50.000m2 de SHON (surface hors oeuvre nette) non pas tant pour sa justification que pour sa localisation dans le quartier Wacken saturé et difficilement accessible.
En effet, la réflexion de la ville de Strasbourg s’appuie sur deux postulats (donc non démontrés):
– La nécessité d’une synergie entre PMC et PEX va rendre ce dernier plus attractif. Aucune étude sérieuse n’a été publiée en ce sens, et chacun sait qu’un grand hall pour y exposer des machines agricoles, ou y organiser un salon du vin n’a pas grand-chose à voir avec un palais de la musique et des congrès où se tiennent des concerts ou des congrès professionnels
– et la nécessité de ne pas artificialiser les terres agricoles en densifiant au contraire les zones urbaines pour ce genre de projet. Projet louable fortement défendu par les écologistes.
Notre propre position est basée sur les nombreux avis des experts économiques, politiques et urbanistiques rencontrés par notre association:
Tous estiment que ce projet ne montre aucune vision urbanistique. On y note une absence de respect d’une extension naturelle d’une ville avec mixité des activités (logements, espaces verts, commerces, accueil petite enfance, parcours piétons, végétalisation, etc. ).
Ce projet va impliquer une bétonisation à outrance dans ce quartier allant du Parlement européen à la place de Haguenau ainsi qu’une concentration d’activités tertiaires (QAE, quartier des banques, PMC, PEX) avec effet de « ville morte le soir » et entrainer une sinistrose dans tout le quartier nord de Strasbourg.
Il ne profitera pas d’une accessibilité optimale par transports en commun (stations Tram éloignées, pas de liaison directe vers la gare, circulation et stationnement des autocars peu pratique)
La circulation automobile dans ce quartier est déjà saturée. Ce n’est pas la création d’une nouvelle sortie de l’A350 derrière le lycée Kléber qui va régler le problème (gestion difficile des accès et sorties aux parkings futurs, gestion de la circulation des flux logistiques (camions de quarante tonnes). Voir plus haut.
Le cabinet d’architectes Feichtinger, retenu en juin dernier par le jury PEX comme le veut la procédure, s’en est tenu au cahier des charges stricto sensu. Mais, pour avoir posé moi-même la question à M.Dietmar Feichtinger le 10 octobre dernier lors de la présentation officielle de son projet par la ville, le problème des flux automobiles n’est pas de son ressort, car c’est à la ville de gérer ces futures contraintes qui ne sont pas minces. Sa réponse montre bien le saucissonnage et l’absence de vision globale de la municipalité.
Déjà à l’été 2012, le préfet Monsieur Bisch (juin 2012, pièce 5.2 dossier enquête publique travaux PMC), s’inquiétait : « Le présent projet faisant partie d’un programme immobilier important dans le secteur (PEX en 2014-2017 et Quartier affaires QAE en 2012-2025), il aurait été intéressant d’examiner l’impact potentiel cumulé de tous ces projets connus par la CUS sur la zone globale concernée par ces travaux et notamment sur les continuités écologiques ».
De plus, l’architecte M.Feichtinger a reconnu que son projet n’aurait pas extérieurement le même aspect que celui-ci montré sur les diaporamas (http://www.strasbourg.eu/fr/grands-projets/projet-wacken-europe/parc-des-expositions-pex ). En effet, les contraintes thermiques (isolation en particulier) l’obligeront à utiliser des façades vitrées teintées qui ne ressembleront guère à celles affichées sur ses photos montages. Ainsi, l’aspect aérien et transparent du projet qui a retenu l’attention du jury ne correspondra pas exactement à celui exposé.
Par ailleurs, l’adjoint au maire aux finances, Mr Alain Fontanel, interrogé par nos soins sur le sujet préoccupant du flux des camions de 40 tonnes a évoqué à deux reprises la réalisation d’un tunnel sous l’avenue Herrenschmidt, qui, selon lui, permettrait un tel transit logistique vers le PMC étendu et le PEX 1. Ce projet ne figure sur aucun document connu des Strasbourgeois. Les difficultés de réalisation d’un tel ouvrage ( cf tunnel Centre halles inondé) amènent à se poser des questions. Ne serait-ce que pour son surcoût de réalisation.
Il existerait une alternative à ce projet, sa délocalisation vers le terrain Starlette (port du Rhin).
Celle-ci présente de nombreux avantages: terrains nettement plus vastes (17 hectares contre 8 derrière le Hilton), possibilité de développer une zone économique, ouverture vers l’Allemagne, ligne Tram en plein coeur (ligne D prévue vers Kehl), accessibilité multiple dont la voie fluviale pour navettes, ligne train en plein coeur, proximité avec le centre-ville (qui permettrait aux congressistes d’aller dépenser vers les commerces (selon France Congrès, un congressiste étranger dépense en moyenne 200 à 300 euros par jour et un français, 175 euros), pas de problèmes de stationnement, absence de nuisances auprès de riverains.
Dans l’éventualité d’une alternance aux prochaines élections municipales, la reprise du projet actuel n’est pas à exclure. La mise à l’étude de la variante Starlette est en effet présente à l’esprit de certains candidats (Fabienne Keller et François Loos- cf Le Nouvel Observateur-page XIV-13 juin 2013).
À ce stade d’avancement du projet, son abandon est encore possible. (coût: maximum 2% du total du projet HT), il y a de nombreux précédents.(l’abandon très récent de l’écotaxe par le gouvernement Hérault va coûter 800 millions d’euros de dédommagement aux entreprises ayant emporté le concours pour la construction des portiques routiers-propos du ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll).
Conclusion:
QAE : nécessité d’une meilleure transparence dans les coûts (part des investissements privés, attractivité) et besoin d’une réelle mixité urbanistique (commerces, logements, espaces verts…).
PMC : la légitimité de cette extension n’est pas à remettre en cause, mais il convient de mieux appréhender les circulations piétonnes, l’accessibilité au TRAM, le stationnement dans cette zone.
PEX : une relocalisation dans la ville est tout à fait envisageable sur les terrains Starlette: elle respecterait la densité urbaine, aurait une meilleure accessibilité (Tram, train, fluvial, routier) et aurait l’avantage de s’ouvrir vers nos partenaires européens.
Ce secteur Wacken reste un lieu déterminant de passage pour accéder à d’autres quartiers: Robertsau, Schiltigheim, centre ville: quid d’un plan de circulation pris dans sa globalité?
Arnault Pfersdorff, président de l’Association Défense Intérêts des Riverains de la rue du Tivoli
une tribune a charge uniquement publiée pour préserver les avantages d une poignée de nantis qui sont prêts a sacrifier l’avenir économique du territoire pour préserver leurs privilèges. Contre l intérêt général la défense d un intérêt particulier. Tous les points contestés on fait l objet de multiples réunions , explications , modifications pour arriver a un projet , d une très grande qualité et qui transformera durablement la vie économique de notre ville .