Pex : pour Zona c’est non.

Pex : pour Zona c’est non.

Dans le cadre de la « concertation » sur l’avenir du site où doit se construire le futur PEX (Palais des Expositions), l’association Zona ceinture verte de Strasbourg, par la voix de son président Denis Matter, exprime son opposition. 

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Avis exprimé par l’association ZONA Ceinture Verte de Strasbourg, par la voix de son Président Denis Matter le 31 août 2018 

Nous nous opposons formellement à ce projet car tous les terrains sur lesquels est prévu le nouveau parc des expositions PEX sont situés dans la Ceinture Verte de Strasbourg régie par la loi du 21 juillet 1922 qui l’a créée et la loi du 7 décembre 1990 qui l’a modernisée. Le calcul des droits à construire produit par la Ville de Strasbourg permettrait d’urbaniser 114 hectares de surface au sol de construction SHOB alors qu’il ne reste pas 30 hectares de terrain libre et constructible. Ce résultat hors de proportion avec la réalité est confirmé par le fait que ces droits à construire au rythme actuel de construction de 65.000 mètres carrés pendant les 25 dernières années, représentent un programme de construction pour 400 ans. Le résultat de ce calcul est insultant pour la raison, le cœur et l’intelligence.

Car c’est faire insulte au législateur et aux strasbourgeois que de nier que le Parlement français ait voté ces lois pour maintenir autour du centre-ville de Strasbourg une ceinture d’espaces libres, de parcs et jardins dans l’intérêt de l’hygiène et de la salubrité, donc dans l’intérêt général des habitants.

C’est également faire insulte aux habitants de la ville que d’essayer de leur faire croire que tous ces terrains que la loi a permis à la collectivité de s’approprier à vil prix en raison de l’intérêt public qui était lié à son objectif, peuvent aujourd’hui être urbanisés de façon aussi massive, sans aucun respect de l’esprit de la loi et contre tous les objectifs actuels de santé publique, de préservation de l’environnement, de maintien d’espaces verts, d’agriculture de proximité, de jardins publics, et d’économie des terrains non bâtis, enfin de contribution à l’effort de lutte contre le dérèglement climatique. C’est pourtant l’esprit de ces lois visionnaires.

Quand on voit qu’ici l’hôtel Hilton a été construit en infraction avec la loi s’agissant d’un bâtiment privé construit au-delà de la bande de 40 m constructible le long de l’allée Herrenschmidt, quand on voit que la chaudière a été construite sur un stade d’athlétisme, quand on voit que le projet de PEX se réaliserait sur le stade universitaire et ses installations multisports qui ont été détruites dans ce but précis, on comprend qu’ici ce sont les intérêts des puissances financières et des groupes de pression qui sont en action et pas du tout l’intérêt public défini par la loi pour l’hygiène et la salubrité publique des habitants de Strasbourg.

Que reste-t-il de la morale, de la raison, de l’intelligence des lois quand le tsunami mortifère des financiers et des groupes de pression passe par là ?

Nos élus et leurs affidés de l’administration municipale affirment sans rire que s’il y a plus de « droits » à construire calculés (114 ha) que de terrains restant constructibles (moins de 30 ha), il suffira de ne pas construire la totalité des 114 ha de surface au sol de béton, mais de s’arrêter dès qu’il n’y aura plus aucune possibilité de construire. C’est se moquer des habitants quand on voit qu’il reste selon leurs allégations pour 400 ans de possibilités de construction (114 ha de « droits », 6,5 ha construits en 25 ans entre 1990 et 2015 !) et qu’ils se sont arrogés des « droits » à construire sur 20% de la surface des autoroutes, voies ferrées, cours d’eau, ponts, tunnels, parkings, cimetières… qui sont bien sûr inconstructibles.

La Ville parle beaucoup de ses « droits », mais où sont passés ses « devoirs » envers la population ? Oubliés le devoir de protection de la santé des habitants, le devoir de protection des ressources en eau, le devoir de sauvegarde des ressources foncières pour les terrains « non aedificandi » non bâtis, le devoir de qualité de l’environnement ? Les notions d’ « hygiène et salubrité publique » ont disparu dans un tsunami mortifère soutenu par les juristes de la Ville et leur rhétorique mathématique, leur volonté de gagner en justice quel qu’en soit le prix à payer par les habitants. Ils n’ont pas supporté  les succès juridiques des associations qui ont stoppé en 1990 leur tentative d’expropriation illégale de ces terrains privés de la Ceinture Verte qui restent aujourd’hui des îlots préservés dans un raz de marée de béton.

Le PEX poursuivra la destruction de la Ceinture Verte entamée en parfaite synergie (comme ils l’écrivent) par le quartier d’affaires du Wacken, où ce sont les groupes financiers internationaux qui dictent l’urbanisme aux élus : un parking ici, une route là, un parc pour nos VIP, des terrains de sport à proximité, un cadre exceptionnel loin des autoroutes s’il vous plait… et en zone inondable pour le bénéfice sans doute des communes en aval sur l’Ill…

Strasbourg est une ville polluée, au point que l’Etat a été mis en demeure par l’Europe d’y porter remède. Pollution de l’air et des sols, on expulse des jardins familiaux pour les détruire sans les dépolluer comme au Heyritz, on supprime des branchements d’eau sur la nappe phréatique devenue impropre à la consommation de ces mêmes jardins sans la dépolluer comme au pré Saint Gall, la population regarde une terre dont elle ne peut plus se nourrir, où les enfants ne peuvent plus jouer, elle tousse entre les barres d’immeubles le long des axes routiers, et regarde en transpirant les cours d’eau où elle ne peut plus se baigner. Strasbourg c’est pour ses habitants une ville dont le centre devient invivable l’été sans climatiseur, et que l’on fuit pour trouver ailleurs la nature qui est « consommée » car c’est parait-il un « droit » de construire, sinon un devoir : il y a tant de demandes de logements, mais aussi des logements vides. La Ceinture Verte donnerait pourtant à la ville une autre image, en ferait une vitrine exceptionnelle en Europe, si les lois étaient respectées.

A défaut d’empathie pour le cadre de vie et la santé des habitants, les élus et agents de l’administration pourraient essayer de comprendre ce qui a présidé au vote par le Parlement Français de 3 lois (c’est unique en France) pour préserver à Strasbourg un capital foncier exceptionnel de plus de 500 hectares. Il leur suffit de relire les publicités des promoteurs vantant la situation unique et le cadre exceptionnel de leurs projets dans cette Ceinture Verte.

Pour les y aider, revenons aux discussions parlementaires pour comprendre l’esprit de ces lois :

En 1922 : séance du 2 février 1922 à la Chambre des Députés. Rapport fait au nom de la commission de l’armée chargée d’examiner le projet de loi relatif au déclassement de l’enceinte fortifiée de la ville de Strasbourg, par M. Etienne Rognon, député.

« La ville de Strasbourg, s’inspirant des lois portant déclassement des enceintes fortifiées de Paris et de Lille, a demandé que le projet de loi de déclassement soit établi sur les bases suivantes : 1° la zone des fortifications sera cédée à la ville comme terrain de construction, à l’exception des terrains qui seront nécessaires aux services de l’Etat ; 2° la première zone de servitude continuera à être soumise, dans l’intérêt de l’hygiène et de la salubrité publiques, à la servitude non aedificandi. La ville de Strasbourg devra l’acquérir dans un délai de vingt-cinq années et l’aménager en espaces libres : parcs, jardins publics ou terrains de sport. Le projet de loi que nous avons l’honneur de soumettre à vos délibérations a tenu compte, dans toute la mesure compatible avec les besoins des services publics, des desiderata de la ville de Strasbourg, tant au point de vue de son agrandissement que de son embellissement et des besoins de sa population ouvrière croissante. »

En 1990 : séance du 28 novembre 1990, zones non aedificandi de Strasbourg. Page 6138 du rapport de séance de l’Assemblée Nationale :

« En séance publique, M. Oehler et M. Malandain avaient voulu spécifier une disposition figurant déjà dans le plan d’occupation des sols de Strasbourg : en tout état de cause, 80% des terrains ainsi libérés des contraintes des lois de 1922 et 1927 demeureraient non aedificandi, à des fins de protection des zones vertes. Cette disposition ne nous avait pas semblé nécessaire en commission. Mais comme elle correspondait à une réalité, nous l’avons acceptée. »

Il est temps de réagir et de stopper le sacrifice de la Ceinture Verte ici au Wacken et maintenant pour ce PEX sous-dimensionné à budget étriqué, bricolé sur un terrain trop petit et mal desservi, comme une métastase en cœur de ville, en face d’un lycée qui subira pollution, trafic et nuisances, alors qu’il a été construit précisément le long de la Ceinture Verte pour des raisons d’hygiène et d’environnement. Ce projet détruirait définitivement le cadre de vie paisible et arboré des riverains et apporterait en cœur de ville un trafic de camions, fourgonnettes, voitures des exposants et visiteurs tout au long de l’année. La Ceinture Verte est ainsi passée avec le label « Wacken Europe » du statut de « no man’ land » municipal à celui de « poubelle » de tous les projets qui n’ont pas trouvé de place ailleurs.  

Ce capital de terrains libres, de stades, d’espaces potentiels de maraîchage et de nature, ce rôle social de la Ceinture Verte, cette nécessité d’« hygiène et de salubrité publique », ces lois organiques de l’Etat pour Strasbourg, ce ne sont plus les élus et leurs agents qui les défendent, ce sont les habitants et les associations. Et dans l’intérêt public, contre les intérêts financiers portés ici par la Ville, ils disent NON à ce nouveau projet destructeur et illégal dans son esprit et ses intentions. Ce n’est pas seulement un droit de défendre la Ceinture Verte, c’est un devoir. Comme c’est un devoir civique de s’opposer et de résister au n’importe quoi, n’importe comment, au « je construis quel qu’en soit le prix environnemental et sanitaire à payer ». L’argent n’excuse pas tout, l’argent ne permet pas tout, la vraie vie est ailleurs, sans doute dans la nature en ville et dans une véritable Ceinture Verte. Quand les politiques vont-ils reprendre leurs esprits et retrouver le sens véritable de la Loi ?

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